Victor Bérard (10/08/1864 Morez – 13/11/1931 Paris XVIème)

Quelques citations extraites de “Questions extérieures Les Transpyrénéens” dans la Revue de Paris du 1er juin 1905 :

p653 : “Il y a toujours des Pyrénées. En travers des routes mondiales, les Alpes ont disparu de Paris à Rome, de Calais à Brindisi, de Munich à Naples, de Hambourg à Venise, de Vienne à Trieste, les convois circulent sans rompre charge et, tous les dix ans, quelque porte nouvelle, Cenis, Simplon, Gothard, Brenner, Tarvis, Oberlalbach, ouvre aux voies ferrées de l’Europe l’accès du pays italien.”

p658 : “Jusqu’en 1900, donc, les Pyrénées, contournées à leurs deux extrémités maritimes, laissent se joindre bout à bout, mais non se continuer intimement, les lignes franco-espagnoles, de Perpignan à Barcelone et de Bordeaux à Madrid. Longues routes repliées, malaisées, sans liberté, sans franchise, comme on en voit aux abords des forteresses. Portes toujours grevées de ce transbordement incommode entre les deux systèmes de rails ennemis. On parle de supprimer les Pyrénées, de percer à droit fil la vraie route de commerce et de paix, directe, courante.”

p659 : “Madrid, dès 1884, déclarait qu’elle voulait au centre de la chaîne une route assurée à travers cette fidèle province d’Aragon et cette loyale ville de Saragosse, qui jamais n’ont trahi le service du roi. De Paris à Madrid, les calculs de nos Ingénieurs prouvaient que d’autres routes étaient plus courtes et plus commodes. Mais dans les conférences de 1884, les délégués espagnols ne voulaient discuter que le tracé Saragosse-Jaca-Oloron.”

p663 : “Rien n’est instructif en cela comme le rapport fait à notre Chambre des Députés, et – très honnêtement, très consciencieusement fait, – par la dernière Commission des Transpyrénéens : le rapporteur, député d’une région montagneuse et ingénieur de grand savoir, ne peut se hausser à des vues d’avenir et à des calculs d’ensemble; il raisonne de cette route mondiale comme il ferait de quelque chemin vicinal;”

p664 : “Il nous a toujours été utile que des voies transpyrénéennes missent au contact Paris et l’Espagne : il nous est nécessaire maintenant que ces routes, promptement établies, soient poursuivies au delà même de l’Espagne, par des lignes maritimes qui mettent notre France au contact de ses colonies.”

p667 : “Rêve lointain, peut-être ! événements tout proches, je crois. Notre génération ne les verra pas, sans doute; mais qu’est une génération dans la vie d’un peuple tel que le nôtre? Et sur notre vieille terre de France les parents n’ont-ils pas, depuis mille ans, toujours semé et planté, peiné jusqu’à la tombe, non pour eux-mêmes, mais pour leurs descendants? Perçons les Pyrénées : Nos arrière-neveux nous devront ce passage.”

p667 : “Ainsi deux routes, qui peuvent refaire au centuple la fortune de l’Espagne, s’imposent aujourd’hui à nos intérêts français : Paris-Cadix, Paris-Carthagène.”