Jean Sermet (19/01/1907 Toulouse – 02/02/2003 Toulouse)

Une citation extraite de “Les chemins de fer espagnols en 1942” dans la Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest, Tome 13, fascicule 4, 1942, pages 377 à 388 :

p387 : “Il y a surtout la ligne de Burgos à Aranda de Duero. C’est la première section du « chemin de fer du méridien », la voie Nord-Sud du « directo Francia », Madrid-Burgos, fonçant droit à travers la Castille.”

Quelques citations extraites de “Du nouveau sur les chemins de fer espagnols” dans la Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest, Tome 22, fascicule 4, 1950, pages 233 à 259 :

p238 : “A vrai dire, le très faible trafic enregistré sur les deux transpyrénéens de Canfranc et de Puigcerdá (auquel certaines manœuvres intéressées ne sont pas étrangères) n’incitait pas à ouvrir une nouvelle ligne déficitaire. Aussi, bien que tous les travaux soient terminés entre Saint-Girons et Oust et que seule y manque la pose des rails, il ne faut pas compter que l’on procède jamais (?) à celle-ci.”

p244 : “Ainsi se justifie par un exemple concret la très fine remarque du regretté P. Camena d’Almeida qu’en pays de plaine les trains espagnols compteraient parmi les plus rapides du monde. Au reste, c’est précisément pour pouvoir réaliser ces plus grandes vitesses sur des profils accidentés, en même temps que pour obtenir une plus grande stabilité, que, après une très vive lutte contre les partisans de l’écartement « européen » (ou plus précisément anglais) de 1 m 435, a été adopté par Real Orden de 1844 la largeur de voie de 7 pieds de Castille ou 1 m 68 (exactement 1 m 674) qui est l’écartement « espagnol » (et portugais). Instruits d’ailleurs par l’expérience des premières lignes construites, les ingénieurs français et anglais qui furent alors consultés par leurs collègues espagnols opinèrent pour la voie la plus large. Les techniciens des chemins de fer sont presque unanimes à observer que si le coût d’une telle opération n’était aujourd’hui prohibitif il conviendrait pour assurer une meilleure exploitation de nos voies ferrées de les élargir au moins à 2 m 13, qui avait été l’écartement proposé (et réalisé un temps) par le grand ingénieur anglais Brunel pour les lignes du Great Western, où dès 1839 la locomotive North Star construite à cet écartement réalisait des vitesses moyennes de 90 kmh. Ce sont les observations de Brunel qui avaient amené les auteurs du décret de 1844 à adopter la voie large; l’exposé des motifs dit en effet expressément : « consiguiéndose que sin disminuir la estabilidad se pueda hacer mayor el diámetro de las ruedas, lo que también conduce a aumentar la velocidad ». Contrairement donc à ce qu’ont répété souvent des gens sans information, ce ne sont point des raisons politiques ou militaires, mais techniques, qui ont conduit à l’adoption de l’écartement espagnol.”

Quelques citations extraites de “Communications pyrénéennes et transpyrénéennes – Actes du deuxième Congrès international d’Etudes pyrénéennes (Luchon-Pau, 21-25 septembre 1954)”, à l’Imprimerie Privat, Toulouse, Tome 7, section VI, La frontière franco-espagnole, 1962 – “Les chemins de fer transpyrénéens”, pages 127 à 142 – “Le Transpyrénéen central”, pages 180 à 188 :

p127 : “Espagne et Portugal, écartement hispanique de 1m 674 (6 pieds de Castille), identique à celui du Great Western britannique, recommandé par le célèbre ingénieur Brunel et qui d’ailleurs permettait à travers les reliefs accidentés de la Péninsule Hispanique des convois à plus grande capacité de transport.”

p133 : “La première c’est que les « techniciens » n’ont jamais montré beaucoup d’enthousiasme pour les transpyrénéens, sans doute à raison à la fois des difficultés, qui longtemps parurent presque insurmontables, de leur construction et des craintes qu’on avait qu’ils ne fussent pas rentables. Sous ce dernier rapport en particulier la Compagnie des Chemins de Fer du Midi leur a été franchement hostile, et ce n’est pas un secret qu’elle s’est efforcée, par divers moyens, de diminuer le trafic de ceux qui furent construits.”

p134 : “Mme Caralp ayant relevé qu’en 1953 les deux gares de Canfranc et Latour-de-Carol n’ont vu passer que 1% du trafic marchandises franco-espagnol, on les comprend un peu.”

P134 : “C’est donc qu’il s’agissait de chemins de fer à buts politiques, et influencés, jusque dans le détail, par la politique. Non, sauf exception, par la politique franco-espagnole, mais par la politique interne de chaque Etat, et même de la petite politique, celle du canton, souvent destinée à satisfaire des intérêts de clocher.”

p135 : “On admet parfaitement qu’il y ait des chemins de fer politiques. Mais dès lors, ils ne sont pas étudiés en fonction des intérêts économiques ou des réalités de la géographie, sur quoi un accord est assez vite obtenu. Leurs tracés deviennent l’enjeu de batailles politiques et diplomatiques, fonction des appétits locaux manifestés ou d’intérêts gouvernementaux. C’est cette lumière qui éclaire l’histoire des transpyrénéens, ceux de l’Est et de l’Ouest.”

p135 : “On croit pouvoir dire, en gros, que l’Espagne ne s’est jamais intéressée qu’à un seul transpyrénéen, celui de l’Ouest, celui de Canfranc.”

p135 : “Et beaucoup plus pour remercier l’Aragon de ne s’être pas, dans la deuxième guerre carliste, prononcé pour D. Carlos. C’est la fidélité politique de l’Aragon que l’on entendait ainsi récompenser.”

p136 : “La France finit toutefois par se rallier au projet de Canfranc, pour motifs politiques, – pour effacer chez le roi D. Alfonso XII le souvenir des sifflets qui l’avaient accueilli à Paris en septembre 1883 après sa parade à Strasbourg en uniforme prussien. Le prétexte du ralliement français fut un raccourcissement du tracé espagnol par recoupement de la boucle Ayerbe-Zuera. Et comme il y eut par la suite un énergique député des Basses-Pyrénées, nommé Louis Barthou, qui fut ministre des Travaux Publics, l’affaire ne fut pas perdue de vue.”

p137 : “Au prix, il est vrai, d’un tunnel faîtier de 6 730 mètres à l’altitude 1 211 m, et sur le versant français de 14 tunnels, dont un hélicoïdal de 1 750 m, de courbes de 200 mètres de rayon, et de rampes de 35 mm par mètre, entraînant l’adoption de la traction électrique – (en Espagne, traction à vapeur; rampes de 20 mm, ce qui est d’ailleurs déjà sérieux).”

p138 : “… le Gouvernement Français prenait l’initiative de proposer au Gouvernement Royal une « ligne d’attente » Ax-Ripoll, se substituant « provisoirement » à celle de Saint-Girons à Lérida. Ce coup de théâtre était une subtile et double manœuvre politique, à usages externe et interne. Sur le plan international, Delcassé, qui de concert avec Edouard VII préparait l’Entente Cordiale, tentait de faire glisser l’Espagne hors de l’orbite allemande, et en même temps de lui faire accepter au Maroc, le partage, tel que le voyait la France, des zones d’influences française et espagnole.”

p139 : “Ainsi, la ligne d’Ax à Ripoll est-elle, voulue par la France, éminemment politique, exact pendant de celle de Canfranc, voulue par l’Espagne.”

p180 : “Quand au surplus, les deux lignes centrales existantes, de Puigcerdá et même de Canfranc sont manifestement sans vie, du moins autre que celle imposée par les traités ou les relations locales internes.”

p182 : “Mais en France, elle débouche sur une vallée accidentée et longue: elle n’atteint même pas Pau directement, puisqu’elle fait à partir d’Oloron un grand détour par Buzy; et à Pau elle est mal rattachée aux grandes lignes françaises.